Fabrication 
Les instruments que je fabrique, entièrement faits à la main, sont inspirés de grands maîtres Luthiers que j’affectionne, tels que A. Stradivarius, Guarnerius del Gesù, Bergonzi, Gagliano, Vuillaume, Lupot
Je travaille essentiellement sur commande car le choix des caractéristiques de l’instrument dépend d’ une importante réflexion convergente entre le Musicien et son Luthier.
Ainsi, les principaux thèmes sont le choix du bois, du vernis, le modèle, et pour finir, le réglage. Chaque détail a son importance. Le résultat est un instrument original et unique.
Pour pouvoir reproduire un modèle de violon, le luthier fabrique des moules et des modèles
Étapes de fabrication
Pour le contour de la table, pour les ouïes, pour l'épaisseur de la voûte, pour la tête.
La table et le fond sont formés ; le plus souvent la table est constituée de deux pièces afin d'assurer une symétrie des largeurs des fibres de part et d'autre de l'axe central pour des raisons de sonorité, tandis que le fond peut être d'une ou de deux pièces selon le choix arbitraire du luthier14. Les tables et fonds en deux parties sont obtenus à partir d'un morceau fendu en deux. Le luthier trace une ébauche de la forme de la voûte et détermine les contours exacts de la table et du fond.
Bille coupée « sur sens » (ou « sur maille »). Les quartiers sont divisés verticalement. Les deux parts symétriques sont collées pour former fond ou table.
Une fois les contours de la table et du fond découpés (à la scie à chantourner par exemple) puis affinés (canif, lime), le luthier procède à l'élaboration des voutes. À l'aide de larges gouges d'abord, puis de rabots "noisettes" ensuite, les voutes sont ébauchées. On procède aux finitions en utilisant des racloirs de diverses formes, jusqu'à l'obtention des voutes désirées dont le galbe revêt beaucoup d'importance dans la production de la sonorité.
L'étape du filetage consiste à poser les filets à 4 à 5 mm du bord. Ce sont trois fines lignes qui ont, en plus d'un rôle décoratif, un rôle de protection contre les chocs, susceptibles d'amorcer des fissures dans le sens du fil du bois : les filets préviennent la propagation de telles fissures. Les deux lignes noires peuvent être en alisier teint, en ébène, en poirier, voire en baleine ou en cellulose issue du carton et compressée15. La partie blanche peut être en houx, en buis ou en charme. Ils sont dans certains cas inexistants, et ne figurent alors que les emplacements creusés des deux filets noirs ; enfin, dans l'état de finition le moins avancé, ils ne sont que peints à l'encre de Chine16. Certains luthiers, comme Maggini ont utilisé des doubles filets : il semble que cette technique soit purement décorative.
Puis le luthier creuse le fond au rabot et à la gouge et place 7 taquets (petites pièces de bois) sur celui-ci au niveau du joint (s'il y en a un), afin de le consolider. Il donne au fond son galbe définitif.
La même étape de creusage a lieu sur la table et les ouïes sont percées. La barre d'harmonie est alors placée ; il s'agit d'une longue pièce de bois, placée sous la table au niveau du pied gauche du chevalet. Elle sert à aider le violon à vibrer, et à résister à l'importante pression exercée par les cordes.
En vue de l'assemblage du fond et de la table, pour former une caisse de résonance, on en construit les bords verticaux que sont les éclisses. Contrairement à la table, l'orientation des fibres du bois n'a ici qu'un rôle décoratif17. Les éclisses sont cintrées au fer chaud. Puis on les assemble sur une forme au moyen de petites pièces de soutien qui contribueront à la rigidité de la caisse de résonance : tasseaux, coins, contre-éclisses.
Le manche et la touche sont les dernières grandes pièces à réaliser. L'étape délicate de la conception du manche est la taille de la volute, car le modèle utilisé est difficile à appliquer à la pièce à cause du relief (la volute « monte » en même temps qu'elle « tourne »). On creuse le chevillier, partie où passent les cordes, entre le sillet et les chevilles ; dans certains cas, il a même été creusé entièrement, sans que cela n'ait d'autre incidence qu'esthétique18. On taille la touche, large de 25 mm au niveau du sillet, de 49 côté chevalet, et arrondie comme le chevalet.
Puis vient l'assemblage global : on colle le fond sur les éclisses puis, après avoir retiré la forme, on fixe la table ; enfin on enclave le manche dans le corps du violon en forçant un peu et on le colle. On fixe alors la touche au manche avec quelques gouttes de colle, afin qu'elle tienne le temps de concevoir le sillet (que l'on ne fixe lui aussi que très légèrement) et de tailler proprement le manche. Puis on fait sauter touche et sillet : l'instrument est terminé en blanc. On procède à l'encollage, c'est-à-dire que l'on enduit le violon d'une sous-couche empêchant le vernis de pénétrer dans les pores du bois. Cette sous-couche peut être à base de gélatine, de blanc d'œuf, d'huile... Le violon peut à présent être verni.
Le luthier recolle alors la touche, taille et place les chevilles, puis le bouton. Vient ensuite la taille et la pose de l'âme, située en largeur au niveau du pied droit du chevalet, et en longueur à 3 mm en arrière de celui-ci. Le luthier vernit le manche avec un vernis peu coloré et plus résistant aux frottements de la main et à la sueur. Enfin, il retaille le chevalet brut fourni par le fabricant et le place en même temps qu'il installe les cordes. Le violon est à présent terminé, et ne restent plus à faire que des réglages de la sonorité.
Vernis
Plusieurs dos de violons. On note l'importance des variations de teinte des vernis.
Le vernis a un rôle esthétique et un rôle de protection contre l'humidité due à la sueur et à l'air ambiant, dont l'hygrométrie est variable. Plusieurs recettes de vernis existent : à l'alcool, à l'huile de lin, à l'essence grasse (procédé Mailand), propolis... La technique consiste en un mélange variable de solvant et de laques, essence de térébenthine, résines, gommes et colorants, que l'on applique en couches successives sur le violon, et que l'on polit (d'où l'intérêt d'ôter la touche, afin de pouvoir polir le vernis situé sous son emplacement).
Le vernis peut avoir différentes teintes, extrêmement variables d'un cas à l'autre suivant les colorants utilisés, l'usure et la patine. Ainsi, il peut aller du jaune doré pour les Amati au rouge brun des Bergonzi en passant par l'orange foncé pour les Stradivarius ou le brun terne des instruments bas de gamme de l'école allemande du XIXe siècle.
L'influence du vernis sur la sonorité a été âprement discutée. La recette utilisée par l'école de Crémone ayant été perdue, et les luthiers cherchant la ou les causes de la qualité des violons issus de celle-ci, on a supposé que le vernis jouait un rôle fondamental quant à la sonorité du violon. Il est à présent admis que le vernis ne peut pas modifier considérablement le timbre du violon ; il n'influe que sur son aspect et sa résistance au temps.
Le temps nécessaire à la fabrication d'un violon est délicat à estimer, car il dépend de l'expérience de l'artisan. On considère qu'un artisan confirmé fabrique un violon en 30 à 45 jours, le bois étant déjà sec. L'étape la plus longue à réaliser est le vernissage, car chacune des nombreuses couches n'est appliquée qu'après le séchage de la précédente, or il peut y avoir jusqu'à trente applications successives20.
Le prix d'un violon est très variable. Ainsi, un violon d'usine fabriqué en Chine dans les années 1980, vendu avec mentonnière et étui, coutait moins de 1 000 francs21. À l'exact opposé, les anciens violons des grands luthiers italiens atteignent des sommes considérables lors de ventes aux enchères. Le dernier record enregistré revient à un Guarnerius del Gesù de 1742 qui a été joué par Yehudi Menuhin et qui a été vendu le 29 octobre 1999 à Zurich à plus de 2,6 millions de dollars22. Il existe un juste milieu ; Menuhin propose par exemple comme bons violons les productions de la lutherie espagnole du XVIIIe siècle ou celles de la lutherie tchèque23. Un violon à l'état brut, sans vernis, se nommera violon sylvicole ou tout simplement un "violon en blanc".